Tout quitter pour mieux recommencer


A propos, c'est qui Ladra? / lundi, octobre 30th, 2017

Prendre cette décision de partir, c’était déjà commencé le voyage. Je crois que quand on s’enracine trop longtemps au même endroit, le mieux c’est de balancer une grenade là où on se trouve et de sauter vers l’inconnu. [M.T]

On est des PVTistes. On quitte tout pour un an ou deux. L’un ou l’autre, on quitte tout, comme si on n’allait plus revenir. On est tellement dans le départ, dans l’excitation de la nouvelle vie, on ne pense à rien d’autre. Les au revoir sont durs mais on a tellement hâte de commencer cette aventure, ce PVT, qu’on les supporte bien et le sourire revient vite. Déjà dans l’avion, il refait surface, trop excités par ce qui s’en vient.

On atterrit, on est émerveillé de tout. On découvre chaque jour quelque chose de nouveau. Un nouveau quartier, un nouveau plat, une nouvelle personne. Tout est beau, tout est mieux.

Puis vient le moment du doute.

Apres deux semaines, un mois, deux mois. On n’est plus tant émerveillé. Ce qu’on a dans la tête, ce ne sont plus les nouvelles choses mais les anciennes. On en a vu assez pour que le manque de notre « chez nous » fasse sa place. On ne veut plus manger de poutine, on veut retrouver nos apéros fromages-saucissons. On s’en fout que les québécois soient avenants ou bienveillants, que la coloc soit cool, on veut retrouver nos amis, notre famille… notre chat. On ne veut pas chercher un nouveau travail, on veut retrouver celui qu’on avait. Finalement, on se dit qu’il n’était pas si mal et qu’on n’aurait pas du le quitter. On se demande ce qu’on est venu faire ici à des milliers de kilomètres de ce qu’on connaît, de ceux qu’on aime, de notre confort, de notre vie réelle.

Et j’imagine qu’à ce moment, soit ça passe, soit ça casse. Soit on rentre, soit on reste.

Pour moi, c’est passé. C’était le moment de la transition.

Je ne voulais plus à faire des apéros fromages-saucissons (même si on s’entend, ça faisait toujours plaisir quand il y en avait !). Je ne cherchais plus à comparer mon pays de naissance et mon pays d’accueil. Je m’adaptais, m’établissais et commençais à construire ma vie ailleurs. Comme si je n’allais plus partir. Et c’est ça le piège. Un an, on a le temps et en même temps, on ne l’a pas. Un an, c’est tellement long et tellement court. Ça donne le temps de s’installer pour mieux vous arracher à vos nouvelles racines. Ça vous donne le goût pour mieux vous dégoûter.

Au début, c’est sur qu’on a le temps. Et comme tout humain (vous me laisserez pas seule sur ce coup), on procrastine. On se dit qu’on aura l’occasion de refaire ce genre de soirée, ce genre d’excursion plus tard. Et puis sans qu’on puisse le voir, l’année est passée. Et on est là, au pied du mur, sans autre possibilité que de tout quitter à nouveau. Cette fois, dans l’espoir de pouvoir revenir.

Le Canada, ça a été ça pour moi. Un coup de foudre il y a 5 ans. Une claque, un réveil cette année. Le Québec m’a donné une gifle. Une gifle qui fait du bien. Parce que je n’y ai pas trouvé qu’un pays d’accueil, j’y ai trouvé ma maison, ma place. Alors c’est sûr, j’ai pas trouvé ma voie. Mais c’est déjà un premier pas. Un bon. Un qui donne des projets, des espoirs.

Si j’y repense à cette année, j’peux pas croire que 365 jours se soient passés.

Et pourtant, j’ai profité ! J’ai savouré (presque) chaque jour. J’ai voyagé et découvert des régions incroyables, j’ai travaillé et découvert de nouveaux métiers, rencontré des québécois et découvert une nouvelle culture. Des liens d’amitiés se sont créés, renforcés et une nouvelle famille s’est formée.

Et une fois que tout ça est créé, une fois que tu te sens bien dans tes basques, que tu te sens t’épanouir, tu te retrouves dans un avion aux lumières de discothèque, direction l’Europe ! Et c’est seulement à ce moment là que tu te rends compte que tu ne rentreras pas à ta coloc ce soir, que tu n’iras pas à la prochaine soirée avec toute ta gang, qu’ils sont là, en bas, à continuer leur vie et que toi t’es là, en haut, à t’en aller dans une autre direction. À ce moment-là, tu craques.

T’as pu rester forte toute la journée, mais seulement parce que tu réalisais pas ! Tu sais que tu vas être heureux de revoir tes amis, ta famille, tes habitudes mais pas là, là. En ce moment, t’es pas heureux. T’as l’impression d’être arraché, déchiré. Pourtant on le savait d’avance. On était venu par curiosité, on était venu chercher quelque chose de meilleur. Heureusement et malheureusement, on l’a trouvé. Et on le sait au moment du départ que le retour fera bien plus mal. Mais on n’y pensait pas.

Je suis sur le chemin du retour, j’ai l’impression que tout ça n’était que rêve. Et dans cet avion, c’est comme si rien ne s’était passé. Tout est allé si vite. Mais, au fond, je sens que le monde, Mon monde, a complètement changé. J’en ai fini de tout quitter.

 

Jusqu’à la prochaine grenade… 

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